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Laurent Ducastel Ecrivain
5 septembre 2014

PAPARAZZIS

Hier, au marché de l’Isle-Adam, Valérie Trierweiler était juste devant nous à faire la queue chez le boucher. Jusque là rien d’anormal, si ce n’était deux paparazzis en embuscade qui la photographiaient de loin. Elle, magnifique de détachement, tentait de faire comme si de rien n’était. Nous savions tous qu’en venant au marché faire ses courses, elle tentait juste de renouer avec un semblant de normalité. Mais de normalité, il n’allait bientôt plus être question. Car nos deux paparazzis, s’enhardirent très vite et s’insérèrent dans la queue qui attendait d’être servie. Au début, ils firent attention un peu à nous, enfin pas au point de s’excuser quand même. Puis soudain, comme enivrés par leur propre culot, ils se mirent à perdre toute mesure, jouant des coudes, nous piétinant, nous marchant dessus avec une outrecuidance, un sans-gêne qui ressemblait bien aux magazines pour lesquels ils œuvraient. A partir de ce moment-là, ils cessèrent d’être des hommes. Ils mitraillaient en rafale, pour être sûr de ne pas en manquer une miette. C’était une scène capitale, l’ex-première dame qui achetait sa viande. Non ? C’était à croire, pourtant. Car l’un d’eux était maintenant quasiment en transe. L'œil fixé dans son viseur, il semblait en apnée, son visage rougeaud déformé, sa bouche tordue. C’est tout juste s’il ne bavait pas, son doigt rivé sur le déclencheur.

En voyant le visage du paparazzi en action, si près de moi que je sentais son souffle, la barbarie un instant m'est apparue. Il y avait sur son visage l’abjecte expression de la bestialité la plus pure, la plus sauvage. Dans ma vie et ma jeunesse en banlieue nord, j’avais des dizaines et des dizaines de fois été confronté frontalement à la violence, aux combats de rue, aux rixes alcoolisées de fins de soirées, aux deals qui tournent mal. Je n’avais que rarement vu cette expression : le visage de la bête.

Vous auriez dû voir son sourire de hyène, un sourire à faire frémir quand il contempla son écran de contrôle et apprécia les clichés qu’il venait de prendre. Il y avait surement du pognon à la clé et à coup sûr, ce mec ne voyait pas plus loin. On aurait dit qu’il en jouissait, un peu comme les méchants acteurs pornos sur le retour des années 70 tandis qu’elle, droite et stoïque, s'efforçait de donner le change. Dans la queue, la stupéfaction avait fait place à un sentiment de malaise. D’autant plus prégnant que bientôt les deux paparazzis se sont mués en une horde quand les passants armés de leur smartphone s’y mirent eux-aussi.

« Vous ne pouvez pas lui foutre la paix, » a dit offusquée une femme derrière moi. Tout ce cirque était tellement ignoble, dégueulasse, sale, intrusif et inquisiteur, qu’à titre personnel, j’avoue en avoir été pantois.

Les médias nous vendent les paparazzades comme des scènes souvent funs, proches du vaudeville où des affaires de cornecul. Mais c’était là, in vivo, une situation finalement d'une extrême violence. Ces mecs étaient censés traquer la vérité, mais la vérité n’avait plus sa place là-dedans. C’était du business et rien de plus.

C’était la curée version zoom et haute définition.

Sa viande payée, Valérie Trierweiler a repris sa vie. La nuée l’a suivie un moment, puis elle s’est lassée. Maintenant, même au marché, pour paraphraser Debord, c’est la société du spectacle qui prévaut.

J’espère au moins pour elle que son rosbeef était bon.

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Commentaires
M
La vérité, c'est sûr : Valérie Trierweiler est comme tout le monde, elle achète de la viande, quel scoop! C'est effectivement dingue comme on peut chercher à gagner du pognon avec n'importe quoi... mais s'il n'y avait personne pour acheter ce genre de magazines ou regarder ce genre de photos sur le net, peut-être que le problème serait réglé. Le voyeurisme est malheureusement assez humain, même s'il est particulièrement malsain.
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